UNE VAMPIRE AU SOLEIL

CIE LE CRI DE L'ARMOIRE

Une vampire prend la parole.
Loin du glamour des films et séries américaines, loin des clichés d’ail, de pieux et autres crucifix, elle raconte ses souvenirs. Mais la mémoire n’est pas toujours au rendez- vous. La mémoire lui fait défaut. Ses souvenirs sont émaillés de trous. Elle raconte pourtant. Elle évoque sa rencontre avec l’homme barrière, celui-là même qui l’a faite basculer. Elle parle des tâches de soleil sur les murs de la chambre de son enfance. Elle révèle la nuit et la vie sociale insoupçonnée, qui lui est rattachée. Elle raconte la nuit et le souvenir du jour.
Mais est-elle vraiment vampire ? Le récit qu’elle s’efforce de se/nous raconter n’est-il pas un prétexte pour fuir ce qui est réellement en train de se produire ? Et qui est ce musicien qui insidieusement détourne son attention ?
Une vampire au soleil est le récit instable et sinueux d’une femme sous emprise, prenant le risque de l’exposition, de la brûlure irrémédiable.

THÉÂTRE RÉCIT

Tout public
À partir de 13 ans
Durée : 1h15

▶ Dossier
▶ www.lecridelarmoire.fr

NOTE D’INTENTION

La question du récit est un axe de recherche inépuisable. Ayant travaillé sur les rêveurs lucides, le sujet de l’auto-conviction est apparue. On parle d’activités oniriques pour les animaux, pas de rêve. Le rêve est défini par le récit qu’on en fait. C’est le Rapport de rêve qui inscrit le rêve dans notre mémoire.

Pour autant, dès que nous faisons le récit d’un rêve, nous faisons des choix radicaux, de vocabulaire, de transcriptions, etc. L’activité onirique, dès qu’elle se transforme en rapport de rêve, devient interprétée, orientée, subjective à notre corps défendant.
Nous faisons la même chose quand nous racontons nos souvenirs. Nous les façonnons, les arrangeons.
Je voudrais interroger cette question de l’auto-fiction involontaire dont nous sommes les plus sûrs architectes. Nous glorifions, amoindrissons, exagérons. Nous nous victimisons, nous nous héroïsons. Et pourtant nous sommes convaincus d’être les fidèles témoins d’événements auxquels – pour certains – nous n’avons même pas assisté.
La Vampire est un personnage qui vient témoigner au grand jour, au soleil. Elle se livre et prend le risque de la brûlure. Elle raconte des passages de sa vie sur plusieurs générations. Mais quelle est la véracité de ces récits. Est-elle la personne qu’elle prétend être ?
Qui est le musicien qui, derrière elle, se permet des commentaires, des précisions. Pourquoi reprend-il des phrases en changeant quelques détails ? Pourquoi enregistre-t-il cette femme qui parle ?

L’imagination comme refuge et comme arme
Il y a un récit caché dans une vampire au soleil. Celui ci n’est pas raconté. Pas au début du moins. La véritable méta-histoire est celle d’une femme en train de subir une agression. C’est dans l’espace temps qu’elle ouvre pour survivre, que nous sommes.
Nous assistons au récit d’une vie recréée à partir de l’instant T du traumatisme. C’est une course à la survie, une course fictionnelle effrénée où le seul vestige de réalité est le musicien au plateau. Faussement discret, faussement effacé, il est comme une voix de l’inconscient ré-insufflant des bouts de réel dans le récit de la prétendue vampire. Par métaphores, par questionnements, le récit fictionnel salvateur est traversé de ces éclats créant le bug dans la matrice, la possibilité d’une réouverture à la dure réalité, pour enfin réagir et stopper l’agression. Le ton de ce musicien correspond au code du masculin dominateur, si bien qu’il finit par provoquer chez elle l’électrochoc ; lui n’est pas différent d’elle, il n’est qu’une version d’elle-même. Au point que les deux corps (féminin/masculin) fusionnent pour mieux se dresser devant l’adversité. Ce que raconte la prétendue vampire c’est le chemin d’une pensée onirique à laquelle elle accède pour s’armer. Pour changer ses modes de représentations. Pour se dire qu’elle peut dire non et que tout son corps peut l’assister dans le fait de devenir prédatrice au lieu de proie. De devenir la vampire de celui qui veut la vampiriser.

L’éternité face à la mémoire
Avant que la méta histoire de l’agression n’apparaisse, le récit de la vampire fait exister un dilemme. Que vaut l’immortalité si nous n’avons pas la capacité mémorielle pour en figer chaque instant ? Si nous pensons à notre vie, quels sont les souvenirs véritablement actifs qu’il nous reste ? Nous avons des impressions d’enfance et quelques événements marquants. Mais tout est déjà loin. Nos jeunes années d’adulte semblent avoir disparu de nos souvenirs. Qu’avons nous fait entre 20 et 30 ans ? Qu’avons nous fait de ces 3650 jours ? Nous ne le savons plus. Tout au plus nous pouvons nommer l’année de notre Bac. Et nous calculons à partir de là. Une vampire de 300, 500, 1000 ans d’existence, serait-elle dans un trouble de la mémoire comme pourrait l’être une personne atteinte d’Alzheimer ? Avec des fulgurances de l’enfance mais peu de structures mémorielles par la suite ? À quoi ressemble la toute puissance de l’immortalité confrontée à la fragilité et au désarroi de celui qui ne se souvient plus ?

Le soleil et la nuit
Nous voulons aborder ce que propose le monde de la nuit dans Une Vampire au soleil. De même que l’éternité pose la question de la mémoire, elle soulève une interrogation de poids : que fait un vampire toute sa vie qui se résume être une compilation de nuits ? Notre imaginaire façonne rapidement l’image de la boîte de nuit, de l’alcool, du sexe et de la drogue. Très bien, mais combien de temps ? À l’échelle humaine, beaucoup se dépassionnent de ce monde festif après une décennie ou deux. Quelle vie sociale trouver en dehors de cette image d’Epinal ? Qui sont les gens qui vivent la nuit ? Que font-ils ? Quels sont ces métiers que pour la plupart nous ignorons ? À travers ses récits, la vampire évoque ce monde où la temporalité semble différente. Un monde où le son a davantage d’espace pour se diffuser. Un monde où tous les soleils sont gâchés.

Marien Tillet

DISTRIBUTION

Mise en scène: Marien Tillet
Interprètes : Marik Renner (jeu) et Marien Tillet (jeu et musique)
Texte et musique : Marien Tillet
Co-écriture : Marik Renner
Scénographie et lumières : Samuel Poncet
Dispositif sonore : Pierre Alain Vernette

MENTIONS

Production : Le Cri de l’Armoire
Coproduction : La Maison du Conte (Chevilly-Larue), La Manekine (Pont Sainte Maxence), Le Centre des arts du récit
en Isère (Saint Martin d’Hères), Collectif 77
Partenaires et résidences : Les Tréteaux de France, Le T.A.G. Grigny, Pôle culturel de Chorges, Centre culturel de Gonesse
Coréalisation : Le Théâtre Dunois (Paris)

La compagnie Le Cri de l’Armoire est conventionnée par le Ministère de la Culture, DRAC Île-de-France

TOURNÉE 2023-2024

Théâtre Dunois à Paris (75)
Le 27 février 2024 14h30
Le 29 février 2024 14h30 et 19h
Le 1er mars 2024 20h
Le 2 mars 2024 20h
Le 4 mars 2024 14h30
Le 5 mars 2024 14h30
Le 7 mars 2024 19h

Le 8 mars 2024 20h
Le 9 mars 2024 20h

La Barbacane à Beynes (78)
Le 29 mars 2024 14h30 et 20h30

Crédits photos : JO